L’Assemblée nationale débute cette semaine l’examen de la Loi « Climat et Résilience ». C’est l’aboutissement de la démarche initiée à la sortie de la crise des Gilets jaunes et qui a pris la forme d’une convention citoyenne, inédite dans le fond et dans la forme. On peut discuter du bien-fondé d’une telle assemblée dans une démocratie représentative, mais force est de constater que c’est une réponse à la hauteur de l’enjeu, celui du réchauffement climatique. A l’exception de quelques démagogues égarés et allergiques au fait scientifique, plus personne ne conteste sérieusement la réalité de la menace, ni même l’urgence absolue qu’elle représente.
La question qui agite légitimement les médias, les associations, les militants de l’écologie et plus globalement la société est aujourd’hui la suivante : « LA LOI CLIMAT EST-ELLE A LA HAUTEUR ? » ; si l’on s’en tient strictement aux recommandations de la Convention citoyenne, la réponse est non. De même, il serait trop simple de balayer les critiques à l’égard de ce projet de loi en se réfugiant derrière un hypothétique procès en opposition systématique et politicienne. Nombreuses sont les personnes qui regrettent le manque d’ambition de la loi et qui ne peuvent être taxées de mauvaise foi au simple motif qu’elles ne soutiennent pas de fait l’action du gouvernement.
Faut-il pour autant occulter les avancées que proposent ce projet de loi ? Faut-il faire l’économie de la mettre en perspective avec toutes les avancées réelles et concrètes apportées par la majorité depuis le début du mandat ? Faut-il enfin que l’Assemblée nationale ne joue pas pleinement son rôle de co-construction de la loi ?
A toutes ces questions, ma réponse est non. J’ajouterai sur le dernier point que je suis et resterai attaché au rôle déterminant de la représentation nationale. De même que le Parlement contrôle l’exécutif, amende et le cas-échéant repousse les lois proposées par le gouvernement, il ne saurait voter les yeux fermés des dispositions au prétexte qu’elles émaneraient d’une assemblée tirée au sort, censée mieux représenter la volonté du peuple français. Le gouvernement propose la loi, le parlement amende et vote la loi. C’est la constitution de la République Française et aucun mouvement médiatique, aucune pression d’opinion plus ou moins spontanée ne saurait remettre en cause cette mission des représentants élus. Dans le cas contraire, il s’agirait ni plus ni moins qu’une dissolution à bas bruit mais définitive du Parlement. Et in fine, la fin de la démocratie telle que nous la connaissons.
Notre responsabilité en tant que députés est aujourd’hui la suivante : faire de ce qui est aujourd’hui un projet de loi un outil à la hauteur de l’enjeu environnemental. Pour cela, il faut à la fois être conscient de l’urgence mais également des marges de manœuvres concrètes dont dispose une société éprouvée et déchirée par des mouvements contraires.
Consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger, se nourrir : les objectifs visés sont aussi évidents que la route pour les atteindre est sinueuse. Pour porter des mesures au plus proche des réalités, je me suis entretenu avec les associations du Calvados tout en étant à l’écoute des acteurs associatifs nationaux. Fort de ces échanges, j’ai fait le choix de quelques thématiques à approfondir.
Au plus proche du quotidien des Français, le volet alimentaire constitue un aspect essentiel de la loi. Un engagement doit alors être tenu quant à l’origine des aliments au sein de la restauration collective : proposer davantage de produits issus de l’agriculture biologique et Haute Valeur Environnementale, tant pour les légumes que pour les protéines d’origine animale, est primordial. De plus, ne renions pas les convictions intimes d’une partie de nos citoyens : une alternative végétarienne quotidienne doit trouver sa place dans ces mêmes espaces communs. Un regard doit aussi être porté sur les contenants de ces mêmes denrées : pour mettre un terme à la surconsommation de plastique, il nous faut généraliser la consigne pour réemploi des emballages.
Mais ne soyons pas dogmatiques. Nous ne devons pas tomber dans les travers d’une écologie du quoiqu’il en coûte, au détriment du social et de l’économie, au mépris de nos territoires et de notre histoire. Nous devons redoubler de vigilance vis-à-vis des spécificités locales : la lutte contre l’artificialisation des sols doit être pensée en collaboration avec les acteurs de terrain et respectueuse des besoins en développement et en logement pour tous. La protection de notre patrimoine ne doit pas être reléguée au second plan : il nous faut encourager le développement d’une approche globale qui tienne compte des particularités du bâti ancien en matière de rénovation énergétique sans rien renier de notre ambition écologique.
Face à l’urgence climatique, il nous faut cependant porter plus loin cette ambition.
Parce que nos écosystèmes naturels sont plus que jamais fragilisés, cette loi doit renforcer la protection de nos forêts, nos littoraux et nos cours d’eau,
Parce que se déplacer fait partie intégrante de notre quotidien, cette loi doit accompagner le développement de mobilités plus durables et en permettre l’accès,
Parce qu’il n’y a pas de justice environnementale sans justice sociale, cette loi doit garantir à tous les enfants des repas sains et équilibrés à la cantine scolaire.
Il y aurait encore de très nombreux sujets à aborder, des points à améliorer et des problématiques à explorer. Face à l’ampleur de la tâche, il faut faire preuve d’une grande humilité. Je souhaitais simplement rappeler que c’est à la fin d’une bataille qu’on détermine un vainqueur. Je veux croire qu’à la fin de cette bataille-ci, ce seront notre environnement, l’intérêt général et l’avenir de nos enfants qui sortiront gagnants.
C’est la responsabilité de la représentation nationale et c’est seulement à l’issue de ce travail minutieux que l’on pourra juger de la valeur réelle de la loi dite « Climat et Résilience ».